samedi 8 décembre 2012

Le marché du CO2 - Acheter ou vendre un "droit à polluer"


Le marché européen d'échange de quotas de CO2 impose depuis 2005 un plafond d'émission de CO2 à plus de 10.000 installations industrielles. Le principe est assez simple: chaque année, un quota d'émission de CO2 est alloué à chaque installation (1 quota = 1 tonne de CO2). Si une entreprise émet davantage de carbone que la limite imposée par "l'European Union Emissions Trading Scheme", elle doit alors acheter un "droit à polluer" à une entreprise qui aurait consommé moins que son quota. Avec une image, c'est même encore plus simple:


Marché Emission CO2

Si une entreprise dépasse le quota alloué sans acheter son "droit à polluer" sur le marché carbone, elle devra payer une lourde amende de 100 euros par tonne de CO2 de dépassement. L'idée de l'instauration d'un marché du carbone est donc d'inciter les entreprises à diminuer leurs émissions de CO2, en encourageant les entreprises pouvant réduire leurs émissions pour un faible coût à le faire et à vendre ce "droit à polluer" sur le marché. Mais ça coûte combien actuellement le "droit d'émettre une tonne de CO2" sur le marché? En Europe, la bourse spécialisée BlueNext gère ce marché ; la tonne de CO2 s'échangeant actuellement au cours de 8,82 euros.

Cours BlueNext Co2

Sur le papier, c'est donc très beau (1) cela permet de participer à la réduction des émissions de CO2 comme prévue par le protocole de Kyoto en 1997, (2) cela pénalise les industries polluantes au profit des moins polluantes, et donc cela favorise l'innovation et les énergies renouvelables, (3) à partir de 2012, les quotas alloués deviendront payant (sauf pour les secteurs sensibles à la concurrence internationale) ce qui engendrera un gain pour les Etats européens estimé à 15 à 20 milliards par an.

L'émission de CO2 est ce que l'on appelle en économie une externalité négative; cela représente un coût pour la société, sans que ce coût soit supporté par l'entreprise. Pour simplifier, si une entreprise produit un bien X en émettant peu de CO2 ou beaucoup, cela ne change rien à son coût de production. Mais le coût social, qui prend en compte le coût public en plus du coût de production (par exemple maladies et nuisances dues à la pollution...) peut être très élevé. L'allocation de quotas et la création du marché carbone permettent "d'internaliser ces externalités", en donnant des incitations économiques aux agents pour qu'ils modifient leurs comportements. 

Conclusion: "Internaliser les externalités" ! Sous cette belle formule, se cache je pense une piste d'innovation économique extrêmement importante. Il est très difficile de modifier les comportements économiques des agents, mais en rétribuant financièrement les "bons élèves" et en faisant payer "les mauvais" (principe du pollueur-payeur), cela permet de ne pas uniquement baser les initiatives sur une maximisation du profit individuel, mais sur celui de la société (objectifs qui, via l'internalisation des externalités, deviennent communs). Une idée en vrac auquel le Captain' vient de penser serait d'appliquer un principe similaire à la "bonne-bouffe" / "mal-bouffe" pour inciter les entreprises alimentaires à rendre leurs produits plus sains (moins salés/gras/sucrés), en créant un marché du "droit à rendre les gens gros et en mauvaise santé" (oui c'est ultra-compliqué à mettre en place, simple idée dans le vent).

Henri Blaffart (ArcelorMittal) :« Il était tout à fait clair que le projet Ulcos n'était pas prêt »


Vice-président de la division acier plat carbone Europe d'ArcelorMittal, Henri Blaffart estime que l'accord conclu avec l'Etat est « bon pour Florange car il permet d'assurer l'avenir des activités aval ». Il juge qu'il y a encore un avenir en France pour la sidérurgie.


François Hollande a dit jeudi soir qu'il se portera garant des engagements d'ArcelorMittal. Comment interprétez-vous ses propos ?

afp
afp
Henri Blaffart  : Je pense que c'est une marque de confiance. Il a pu constater que nous respectons globalement nos engagements. Ce qui est dit aujourd'hui est assez incorrect. Le groupe fabrique 35% de ses produits plats carbone en France et y emploie environ 20.000 salariés. La France est un pays important pour ArcelorMittal. François Hollande et le gouvernement ont pu se rendre compte du sérieux de notre travail et de nos engagements.

Votre retrait du projet Ulcos a surpris. Pourquoi cette décision ?

Il était tout à fait clair que le projet Ulcos n'était pas prêt et nous avions déjà alerté l'Etat sur les difficultés techniques au cours des négociations. Aujourd'hui nous ne sommes pas prêts à passer à un démonstrateur industriel. Ce n'est pas faisable techniquement et raisonnable sur la plan de la sécurité.

Est-ce viable au niveau économique ?

Le prix de la tonne de CO2 est trop faible pour que le procédé soit viable, ce qui a conduit tous les autres industriels à retirer leurs projets. Nous nous sommes toutefois engagés à continuer à travailler sur cette technologie et nous respecterons notre engagement.

Pourquoi arrêter le projet, juste après avoir conclu un accord avec l'Etat ?

La Commission décidera de l'attribution du financement au démonstrateur industriel Ulcos la semaine prochaine. Il était très important de la prévenir au plus tôt. Le gouvernement français avait connaissance de cette décision.

Quelles sont vos intentions désormais ?

Avec le gouvernement, nous avons décidé d'établir un calendrier prévisionnel sur le projet Ulcos avant la fin du premier semestre 2013. Un budget de recherche de 13 millions d'euros a été décidé avec l'Etat. La répartition du financement n'a pas été fixée. Bien entendu, ArcelorMittal y participera.

Allez-vous présenter un nouveau dossier en 2013 à la Commission?

Les problématiques techniques sont d'une nature telle qu'elles ne peuvent pas se résoudre en quelques mois. Cela va prendre du temps. Nous évaluerons notre éventuelle candidature en fonction de l'évolution des recherches.

Pourquoi pensez-vous que l'accord avec l'Etat constitue « un bon accord » ?

Cet accord est bon pour Florange car il permet d'assurer l'avenir des activités aval. Il consolide aussi l'ensemble de notre dispositif industriel en France. Il était très important pour la Lorraine d'arrêter la phase liquide qui n'était absolument pas pérenne et pas du tout compétitive.

Comment se sont déroulées les négociations avec le gouvernement ?

Les discussions étaient extrêmement intenses et constructives. Il a fallu d'abord passer par une phase de compréhension de la situation. La mission qui avait été demandée par le gouvernement à Pascal Faure a permis de clarifier les enjeux. Les négociations ont permis d'arriver à un résultat positif qui permettra d'assurer l'avenir du site aval de Florange.

Comment seront alloués les 180 millions d'euros que vous allez investir à Florange ?

Cette enveloppe est supérieure de près de 45 % aux 125 millions d'euros qui ont été investis à Florange dans la filière aval au cours des cinq dernières années. Sur ces investissements, qui sont tous stratégiques, 53 millions d'euros seront destinés aux installations pour le marché de l'automobile. Pour le reste, nous préparons un plan à cinq ans qui sera présenté aux salariés la semaine prochaine.

Quel est l'avenir de la filière emballage à Florange ?

Nous nous sommes engagés à maintenir et à consolider cette activité pendant au moins cinq ans sur le site de Florange.

Pour assurer la survie de la filière emballage de Florange doit-on sacrifier celle de Basse-Indre ?

Absolument pas. Dans le périmètre d'Atlantique et Lorraine, il y a deux usines qui produisent des aciers pour emballage. Compte tenu de la faiblesse du marché européen, il a été décidé de concentrer l'activité de laminage du packaging sur le site de Florange. Ce qui entraîne la mise à l'arrêt temporaire de certaines lignes de production aval de Basse-Indre. En dépit de ce transfert d'activité, l'activité est préservée et l'emploi garanti pour les salariés du site.

La sidérurgie a-t-elle encore un avenir en France ?

Oui. Mais il faut comprendre qu'il est dangereux de ne pas s'adapter aux évolutions de la conjoncture.

La France traite-t-elle la famille Mittal d'une façon différente que les autres pays ?

Nous n'avions pas vécu de situation aussi difficile qu'en France. Aujourd'hui, il est important de restaurer le dialogue au plus vite avec tous nos partenaires.

Lakshmi Mittal a-t-il été surpris par les réactions en France ?

Il a été interpellé par les accusations qui sont portées contre le groupe. Il espère que l'ensemble de nos engagements permettra d'y mettre un terme.

Comment allez-vous gérer les tensions sociales ?

Globalement sur le site lorrain le personnel perçoit bien que le plan est positif. Il faut arriver à dépasser l'émotion suscitée par l'arrêt des hauts-fourneaux. Certains actes isolés ne sont pas raisonnables. A Basse-Indre et sur nos autres sites, nous allons travailler avec les salariés pour qu'ils comprennent bien le nouveau dispositif.
PROPOS RECUEILLIS PAR SHARON WAJSBROT

vendredi 7 décembre 2012

Réunion du 7 décembre 2012 pour Arcelor Mittal à Florange

Les Guignols de l'Info du 07/12/12 - Et, c'est Mittal Gagnant !


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Lorraine : l'agonie de l'acier ...

Foutue, la Lorraine, comme on était tenté de le dire, au plus fort de la tempête, il y a quarante ans ?

Parc du Haut-Fourneau U4 à Uckange en Moselle © cc - 2012 / Arnaud Malon
Certainement pas. La vieille région était habituée aux épreuves et quand celle-ci est survenue, elle a réagi de toutes ses forces : on peut même dire qu'elle a pris conscience que l'industrie circulait en elle comme son sang au moment précisément où il se vidait. Ses ouvriers venus de partout se sont sentis à cet instant lorrains comme jamais.
Depuis, chacun a tenté de tracer de nouveaux chemins dans un espace plus large, une euro-région, Sarre- Lorraine-Luxembourg. Il reste que beaucoup sont restés sur le bord du chemin. Aurélie Flippent, aujourd'hui ministre de la Culture mais d'abord enfant de Villerupt, écrit dans "Les derniers jours de la classe ouvrière" - car c'est bien de cela qu'il s'agit : "La vraie histoire de la Lorraine, ce seraient toutes leurs vies aussi, celles des hommes du fer, celles des hommes du charbon qui ont été jetées dans une même offrande aux monstres de la terre, aux gardiens de l'enfer".

Sur les hauts-fourneaux de Florange (Passerelle)

Des promesses, des déceptions, des salariés exaspérés, des élus impuissants... Et dans le viseur, un groupe industriel, ArcelorMittal. Entre 7h et 9h France Inter est en direct de Florange, en Moselle, avec des invités tous liés au destin du site : 

  • Edouard Martin, délégué CFDT d'Arcelor-Mittal à Florange
  • Philippe Tarillon, maire de Florange
  • Anne Grommerch, députée UMP de Moselle
  • Michel Liebgott, député-Maire PS de Fameck
  • Pascal Jaskula, Directeur de la Passerelle à Florange

mardi 4 décembre 2012

Communiqué Anonymous Arcelormittal FRANCE 04 12 2012

Laurent Berger : "Les hauts-fourneaux de Florange ne seront pas coupés cette semaine"

Le nouveau numéro 1 de la CFDT répondait aux questions de Jean-Michel Aphatie lundi matin. Laurent Berger s'est montré formel : les hauts fourneaux de Florange ne vont pas être mis à l'arrêt brutalement, comme l'affirmait pourtant le syndicaliste Edouard Martin. "On a l'assurance que le gaz sera laissé jusqu'au moins en avril", a-t-il déclaré. Un délégué syndical du site mosellan avait affirmé dimanche soir qu'ArcelorMittal s'apprêtait à couper l'alimentation en gaz des hauts-fourneaux, un geste qui entraînerait d'après lui leur "mort définitive".



ArcelorMittal confirme le transfert d'activité de Basse-Indre vers Florange

Florange (Moselle), le 1er octobre. Le site va recevoir une partie de l'activité de l'usine de Basse-Indre (Loire-Atlantique). L'information a été confirmée mardi après-midi par ArcelorMittal et par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. | AFP/Jean-Christophe Verhaegen


ArcelorMittal a confirmé mardi ce que les syndicats de Basse-Indre (Loire-Atlantique) craignaient.Lundi, ces derniers étaient convaincus que leur usine située près de Nantes, site spécialisé dans l'emballage, allait payer l'accord signé entre le gouvernement et le sidérurgiste sur Florange (Moselle). Les activités entre les deux sites vont être réparties différemment, a affirmé une source proche de la direction d'ArcelorMittal : «Dans un contexte de surcapacités dans le secteur de l'acier pour emballage, il faut optimiser les flux» entre les deux endroits. 

Lors de la séance de questions au gouvernement à l', Jean-Marc Ayrault a confirmé ce transfert d'activités de Basse-Indre vers Florange. Il a également démenti «de la façon la plus solennelle» tout accord secret avec ArcelorMittal. Un article du Point avait fait état lundi du maintien de l'activité en Loire-Atlantique en contrepartie de l'arrêt des hauts fourneaux de Florange. Il a par ailleurs assuré qu'«une partie des activités de packaging de Basse-Indre «sont envoyées en Moselle».

60 salariés concernés selon la CGT

Un délégué CGT a estimé à au moins 60 le nombre de salariés concernés par ce transfert. En clair, les lignes traitement de l'acier de Florange vont être chargées au maximum au détriment de Basse-Indre : laminage (amincissement des tôles) et décapage (suppression de la couche d'oxyde de surface).

En revanche, les activités de finition - l'étamage (dépôt d'une couche de cuivre) - seraient renforcées à Basse-Indre, précise la source proche de la direction, même si une des deux lignes d'étamage de Florange doit être maintenue.

Le site de Basse-Indre se concentrerait sur l'acier pour les boîtes de conserve, tandis que celui de Florange fabriquerait de l'acier pour boîtes-boisson (canettes).

Ce plan reste pour l'instant un projet qui doit faire l'objet de discussions avec les organisations syndicales lors de prochaines rencontres.

Cette réorganisation implique un «arrêt temporaire» des activités de laminage et d'étamage de Basse-Indre «sans conséquence en termes d'emplois directs», précise la source, grâce à un «redéploiement des effectifs de l'amont (transformation) vers l'aval (finition)», qui concerne entre 40 et 50 personnes.

VIDEO. L'inquiétude de Lionel Bellotti, délégué FO du site de Basse-Indre (Presse Océan)

Explication d'un cowper

Vue d'ensemble d'un haut fourneau.

QUAND LES SALARIES PARLENT DE LEURS INSTALLATIONS AVEC AMOUR....

dimanche 2 décembre 2012

E. Martin (Cfdt à Florange) : "je dis bravo à Mr Montebourg"


Benjamin Coriat, économiste atterré : « Mittal s’en est bien tiré »


Déçu par l’abandon de l’idée d’une nationalisation, Benjamin Coriat reproche au gouvernement de céder à « toutes les demandes des lobbys patronaux ».

Un salarié d’Arcelor Mittal, après l’annonce de Jean-marc Ayrault, le 30 novembre. (Jean-Christophe Verhaegen/AFP)
Il n’y aura pas de nationalisation temporaire du site sidérurgique de Florange. L’annonce de Jean-Marc Ayrault vendredi a cassé le projet d’Arnaud Montebourg. Une nouvelle couleuvre pour le ministre du Redressement productif. A tel point qu’il était légitime de se demander s’il n’allait pas démissionner.
Ce samedi soir, invité au au journal télévisé de TF1, Arnaud Montebourg a balayé cette éventualité.
« Si j’avais du me sentir désavoué, je n’aurais pas été seul car plus de 63 % des Français soutenaient cette proposition [de nationalisation, ndlr] »
Il a aussi assuré qu’il gardait en tête son idée pour jouer le rapport de force avec Mittal.
« La question de la nationalisation reste sur la table. une arme dissuasive. »
La nouvelle a aussi été mal vécue par les salariés du site. Ce matin, sur RTL, Edouard Martin, responsable CFDT d’Arcelor Mittal à Florange, a accusé le gouvernement d’avoir « menti tout au long » des discussions :
« Jusqu’à la dernière minute quasiment, on nous a fait croire que la nationalisation temporaire était acquise. On n’a pas compris du tout ce pataquès de dernière seconde où Jean-Marc Ayrault a annoncé une piste qui n’avait jamais été jamais évoquée. »
Professeur à l’Université Paris XIII, Benjamin Coriat fait partie des économistes atterrés, ces économistes qui s’opposent au tout libéral. Comme les salariés du site de Florange, il ne comprend pas la décision de Jean-Marc Ayrault et a accepté de répondre aux questions de Rue89.
Rue89 : Etiez-vous favorable à la nationalisation temporaire ?
Benjamin Coriat : J’étais tout à fait favorable à la nationalisation temporaire. Dans la mesure où cela permettait de fabriquer une unité viable, de sauver les emplois et de continuer à faire vivre la région.
Les réserves que j’avais étaient que cette formule ne pouvait pas être considérée comme une véritable politique industrielle. Parce que c’était une opération de sauvetage alors qu’une politique industrielle a une dimension prospective, offensive et prépare l’avenir.
Vous comprenez donc la colère des salariés du site ?
Oui, bien sûr. D’autant qu’on ne sait pas tout. Y a-t-il finalement un engagement à maintenir les hauts fourneaux en activité ou pas ? Il semble que non.
La seule chose qui est dite, c’est qu’on les garde avec la possibilité de les rouvrir. Ce qui veut dire qu’on peut aussi les fermer définitivement. D’ailleurs Jean-Marc Ayrault ne dit pas « le site avec ses hauts fourneaux est sauvé », il dit « il n y aura pas de plan social », ce qui veut dire que même si le site fermé on fera en sorte que les salariés (en âge de l’être) seront reclassés .
En fait tout dépend du fait que l’UE adoptera le projet Ulcos sur le CO2, ou non.

« On ne voit pas l’intérêt de la formule retenue »

Vous avez d’autres réserves ?
Oui, on peut aussi s’étonner de l’annonce du gouvernement français qui va y mettre de sa poche pour des sommes (au delà des 150 millions déjà prévus pour Ulcos) qui sont, semble-t-il, assez importantes.
Et cette fois purement à perte, puisqu’elles seront dépensées au bénéfice de M. Mittal qui reste propriétaire des installations alors que dans le cas de la nationalisation temporaire, c’était des actifs qui restaient du côté public. Donc on ne voit pas très bien, sur un plan strictement économique l’intérêt de la formule retenue.
Il s’en est bien tiré Mittal dans la négociation ! C’est le moins qu’on puisse dire. Il ne prend aucun engagement à maintenir les hauts fourneaux en activité, en revanche l’Etat s’engage à abonder dans des financements supplémentaires, pour une entreprise qui a distribué l’année dernière deux milliards de dividendes. On est quand même dans un monde extrêmement étonnant.
De plus les 180 millions d’investissement de Mittal annoncées d’ici 2015 (si cet engagement est respecté, ce qui reste évidemment à vérifier) ne sont pas une somme qui excède de beaucoup ce qui est de toute façon nécessaire pour assurer le bon fonctionnement de l’aciérie, même sans extensions.
Mais comment se fait-il que cette situation n’ait pas été anticipée ? Cela fait longtemps qu’il se dit que ce secteur est moribond.
Non, non, non le secteur n’est pas moribond. Le secteur de la sidérurgie, comme l’ensemble des autres secteurs en Europe, passe par une période difficile du fait de la récession et de la crise.
Et la récession elle-même, pour partie elle est le résultat des politiques choisies en Europe. En alignant l’ensemble des pays de la zone euro sur les engagements à revenir à des déficit zéro dans des délais très brefs., (dispositions adoptées dans le Pacte budgétaire,) on rajoute de la récession à la récession, partout en Europe.
Dans ces circonstances, il y a des surcapacités, des difficultés, mais en 2007, c’est-à-dire juste avant la crise, Arcelor a fait la meilleure année de toute son histoire.
La sidérurgie comme beaucoup d’autres secteurs connaît une activité cyclique. Ça va, ça vient...

Le site de Florange n’est pas moribond

Vous pensez que le site était viable ?
Ce que les salariés d’Arcelor ont démontré, dans le cas de Florange, c’est que sous certaines conditions, si on garde ensemble le chaud et le froid, le site est viable. Ce qui n’était pas viable c’était la seule partie dont Mittal voulait se défaire. Donc on n’est pas dans des domaines voués à disparaitre.
Montebourg a d’ailleurs sur son bureau un rapport d’expert qui montre que le site Florange si son intégrité est préservée est parfaitement rentable. Si le gouvernement ne fait plus confiance aux experts qu’il a lui même commissionnés, il y a un gros problème…
Le site de Florange n’est nullement moribond. Il fabrique des aciers premiums pour Mercedes et d’autres voitures haut de gammes.
L’histoire n’est pas celle là. L’histoire, c’est celle de Mittal qui s’est surengagé dans l’achat d’entreprises les unes après les autres, et qui a se trouve aujourd’hui surendetté.
A votre avis qu’est-ce qui fait que Jean Marc Ayrault a finalement pris cette décision ?
Le moins qu’on puisse dire c’est que la décision prise est extrêmement décevante. Pourquoi cette extrême frilosité ? On peut avancer deux séries d’explications.
D’abord, il semble bien que la conviction de ce gouvernement est que seule l’entreprise privée est efficace. Il donne l’impression de ne pouvoir envisager d’autres formules, sans une extrême défiance. Je dis cela car avec Florange, les conditions étaient réunies pour franchir le pas et semble-t-il dans des conditions économiques certainement pas plus mauvaises que celles qui ont été adoptées et qui seront mises en œuvre.

Des réticences à la mise en œuvre d’une politique industrielle

Ensuite, je crois que ce gouvernement est très réticent à mettre en œuvre de la politique industrielle sous quelque forme que ce soit. Regardez le rapport Gallois. Hollande avait annoncé qu’il ne fallait surtout pas augmenter la TVA, que les coûts en travail n’étaient pas le problème, etc… A l’arrivée (quelques semaines après ces déclarations) on fait le contraire de ce qui était annoncé !
De surcroît, on pérennise toute une série de dispositifs (dont le crédit d’impôt recherché) qui donnent cartes blanches aux entreprises et créent toutes sortes de niches et d’effets d’aubaines. Rien donc qui relève de la politique industrielle. Et une série de dispositifs pour conforter les choix spontanés des entreprises. On a ainsi une une série d’éléments pour comprendre comment ce gouvernement pense et oriente son action.
Du coup, et même si je comprends le choc et l’amertume des salariés, les décisions prises vendredi sont en cohérence avec les décisions précédentes et le plan Gallois. Au lieu de favoriser des politiques industrielles novatrices, on abonde dans les directions choisies par les entreprises en les dotant de subventions diverses.
A gauche on sent une déception, comme sur la réaction du gouvernement avec les pigeons.
Ah oui... On est très surpris de voir la capacité de ce gouvernement à céder à toutes les demandes des lobbys patronaux ! L’idée de la nationalisation partielle avec revente ensuite aurait peut être couté de l’argent au passage, ça on ne peut pas le dire à l’avance. Mais l’opération choisie vendredi, on ne nous l’annonce pas à coût zéro non plus.