samedi 8 décembre 2012

Henri Blaffart (ArcelorMittal) :« Il était tout à fait clair que le projet Ulcos n'était pas prêt »


Vice-président de la division acier plat carbone Europe d'ArcelorMittal, Henri Blaffart estime que l'accord conclu avec l'Etat est « bon pour Florange car il permet d'assurer l'avenir des activités aval ». Il juge qu'il y a encore un avenir en France pour la sidérurgie.


François Hollande a dit jeudi soir qu'il se portera garant des engagements d'ArcelorMittal. Comment interprétez-vous ses propos ?

afp
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Henri Blaffart  : Je pense que c'est une marque de confiance. Il a pu constater que nous respectons globalement nos engagements. Ce qui est dit aujourd'hui est assez incorrect. Le groupe fabrique 35% de ses produits plats carbone en France et y emploie environ 20.000 salariés. La France est un pays important pour ArcelorMittal. François Hollande et le gouvernement ont pu se rendre compte du sérieux de notre travail et de nos engagements.

Votre retrait du projet Ulcos a surpris. Pourquoi cette décision ?

Il était tout à fait clair que le projet Ulcos n'était pas prêt et nous avions déjà alerté l'Etat sur les difficultés techniques au cours des négociations. Aujourd'hui nous ne sommes pas prêts à passer à un démonstrateur industriel. Ce n'est pas faisable techniquement et raisonnable sur la plan de la sécurité.

Est-ce viable au niveau économique ?

Le prix de la tonne de CO2 est trop faible pour que le procédé soit viable, ce qui a conduit tous les autres industriels à retirer leurs projets. Nous nous sommes toutefois engagés à continuer à travailler sur cette technologie et nous respecterons notre engagement.

Pourquoi arrêter le projet, juste après avoir conclu un accord avec l'Etat ?

La Commission décidera de l'attribution du financement au démonstrateur industriel Ulcos la semaine prochaine. Il était très important de la prévenir au plus tôt. Le gouvernement français avait connaissance de cette décision.

Quelles sont vos intentions désormais ?

Avec le gouvernement, nous avons décidé d'établir un calendrier prévisionnel sur le projet Ulcos avant la fin du premier semestre 2013. Un budget de recherche de 13 millions d'euros a été décidé avec l'Etat. La répartition du financement n'a pas été fixée. Bien entendu, ArcelorMittal y participera.

Allez-vous présenter un nouveau dossier en 2013 à la Commission?

Les problématiques techniques sont d'une nature telle qu'elles ne peuvent pas se résoudre en quelques mois. Cela va prendre du temps. Nous évaluerons notre éventuelle candidature en fonction de l'évolution des recherches.

Pourquoi pensez-vous que l'accord avec l'Etat constitue « un bon accord » ?

Cet accord est bon pour Florange car il permet d'assurer l'avenir des activités aval. Il consolide aussi l'ensemble de notre dispositif industriel en France. Il était très important pour la Lorraine d'arrêter la phase liquide qui n'était absolument pas pérenne et pas du tout compétitive.

Comment se sont déroulées les négociations avec le gouvernement ?

Les discussions étaient extrêmement intenses et constructives. Il a fallu d'abord passer par une phase de compréhension de la situation. La mission qui avait été demandée par le gouvernement à Pascal Faure a permis de clarifier les enjeux. Les négociations ont permis d'arriver à un résultat positif qui permettra d'assurer l'avenir du site aval de Florange.

Comment seront alloués les 180 millions d'euros que vous allez investir à Florange ?

Cette enveloppe est supérieure de près de 45 % aux 125 millions d'euros qui ont été investis à Florange dans la filière aval au cours des cinq dernières années. Sur ces investissements, qui sont tous stratégiques, 53 millions d'euros seront destinés aux installations pour le marché de l'automobile. Pour le reste, nous préparons un plan à cinq ans qui sera présenté aux salariés la semaine prochaine.

Quel est l'avenir de la filière emballage à Florange ?

Nous nous sommes engagés à maintenir et à consolider cette activité pendant au moins cinq ans sur le site de Florange.

Pour assurer la survie de la filière emballage de Florange doit-on sacrifier celle de Basse-Indre ?

Absolument pas. Dans le périmètre d'Atlantique et Lorraine, il y a deux usines qui produisent des aciers pour emballage. Compte tenu de la faiblesse du marché européen, il a été décidé de concentrer l'activité de laminage du packaging sur le site de Florange. Ce qui entraîne la mise à l'arrêt temporaire de certaines lignes de production aval de Basse-Indre. En dépit de ce transfert d'activité, l'activité est préservée et l'emploi garanti pour les salariés du site.

La sidérurgie a-t-elle encore un avenir en France ?

Oui. Mais il faut comprendre qu'il est dangereux de ne pas s'adapter aux évolutions de la conjoncture.

La France traite-t-elle la famille Mittal d'une façon différente que les autres pays ?

Nous n'avions pas vécu de situation aussi difficile qu'en France. Aujourd'hui, il est important de restaurer le dialogue au plus vite avec tous nos partenaires.

Lakshmi Mittal a-t-il été surpris par les réactions en France ?

Il a été interpellé par les accusations qui sont portées contre le groupe. Il espère que l'ensemble de nos engagements permettra d'y mettre un terme.

Comment allez-vous gérer les tensions sociales ?

Globalement sur le site lorrain le personnel perçoit bien que le plan est positif. Il faut arriver à dépasser l'émotion suscitée par l'arrêt des hauts-fourneaux. Certains actes isolés ne sont pas raisonnables. A Basse-Indre et sur nos autres sites, nous allons travailler avec les salariés pour qu'ils comprennent bien le nouveau dispositif.
PROPOS RECUEILLIS PAR SHARON WAJSBROT

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