lundi 9 avril 2012

Wurth: “Nous sommes dans une situation difficile” ??? - Septembre 2011 -

Michel Wurth: «Au 4e trimestre de cette année, nous devrions connaître un certain ralentissement.» Credit Photo@ Luc Deflorenne- PaperJam)
Dans une interview à paraître le 15 septembre dans le magazine paperJam, et dont voici quelques extraits, Michel Wurth, membre du comité de direction d’ArcelorMittal, commente notamment les difficultés actuelles de la sidérurgie. Il confirme que le haut fourneau P3 de Florange ne sera pas réactivé d’ici au moins la fin de l’année. Il souligne des problèmes de surcapacité et s’attend à un ralentissement au quatrième trimestre. Le dirigeant luxembourgeois fait toutefois la distinction entre les sites luxembourgeois.
Monsieur Wurth, l’un des deux hauts fourneaux de l’usine Florange (P3) a été arrêté cet été. Quand prévoyez-vous de le réactiver?
«On ne prévoit pas pour l’heure de le rallumer. En tous les cas certainement pas avant la fin de l’année. Florange tourne donc avec un seul haut fourneau et on verra ultérieurement comment le marché va évoluer.
Les activités de packaging sont également en difficultés sur ce site. Des arrêts et du chômage partiel sont prévus d’ici à la fin de l’année…
«Oui, mais il s’agit là d’une situation directement liée aux conditions météorologiques. La récolte a été moins bonne en raison du manque de pluie. Donc, s’il y a moins de récolte, il y a moins de produits à mettre en conserve et donc il y a un impact sur cette activité de packaging. C’est tout.
Comment se portent les sites luxembourgeois?
«Pour les sites sidérurgiques au Luxembourg, il y a deux familles de produits. Ceux à haute valeur ajoutée, qui sont des vraies niches de spécialité, où la sidérurgie luxembourgeoise est leadermondial au niveau des compétences et des technologies. Cela s’applique directement au site de Belval pour les palplanches, ou bien au site de Differdange les poutrelles Grey, utilisées pour les immeubles multi-étages du monde entier, on encore pour le site de Dudelange où nous produisons l’acier le plus sophistiqué à destination de l’industrie automobile.
En revanche, sur le site d’ArcelorMittal Rodange & Schifflange, qui a encore annoncé de très mauvais résultats, on est davantage axés sur les commodités et le marché de la construction. Et là, on a des problèmes économiques qui sont importants et qui ont nécessité la prise de certaines décisions…
Comment cela se passe-t-il sur le plan social?
«En avril 2011, nous avons annoncé ce que j’appellerai un plan conjoncturel, qui prévoyait la réduction des effectifs et le placement du personnel excédentaire sur d’autres sites, voire dans la cellule dite de reclassement. Nous sommes en train d’exécuter ce plan, ce qui explique aussi pourquoi les résultats de Rodange & Schifflange sont moins mauvais que ce qu’ils n’étaient avant de mettre en place ce plan. Mais ils restent mauvais tout de même.
Ne faut-il pas alors repositionner l’activité de l’usine de Rodange & Schifflange sur des segments à valeur ajoutée pour assurer sa pérennité?
«Cela signifierait reconstruire de nouvelles usines. Cela revient à se demander si l’Europe a besoin de capacités nouvelles pour de nouveaux produits. La réponse est tout de même plus difficile… Il s’agit plutôt d’essayer de voir si on peut maintenir la compétitivité et comment on va gérer l’existant.
A quoi faut-il s’attendre pour les sites de la Grande Région?
«En Europe, la consommation d’acier reste encore inférieure de 20% à 25% à ce qu’elle était avant la crise de 2008. On a donc des problèmes de surcapacités. Cela varie d’un pays à l’autre et d’un marché à l’autre. C’est par exemple mieux en Allemagne qu’en France. Qui dit surcapacité dit arrêt momentané des installations, comme à Florange, pour tenir compte de ces phénomènes-là. Par ailleurs, le 2e semestre est toujours moins fort sur le plan de la demande. Nous sommes donc dans une situation difficile.
Par ailleurs, la sidérurgie luxembourgeoise est essentiellement axée sur des produits pour la construction. Là, il y a manifestement une crise partout dans le monde et ce que l’on voit sur un plan macro-économique n’est pas fait pour améliorer les choses…
Comment jugez-vous l’importance de la crise actuelle.
«Il faut d’abord voir que les effets d’une crise se font toujours sentir avec un ou deux trimestres de retard dans la sidérurgie par rapport aux mouvements boursiers précurseurs. Les commandes faites aujourd’hui le sont pour des voitures déjà vendues… C’est donc au 4e trimestre de cette année que nous devrions connaître un certain ralentissement, car à ce moment-là, nos clients feront face à une baisse de la confiance des consommateurs et à une baisse de la demande.
C’est la raison pour laquelle ces deux derniers mois, il y a eu des corrections de cours boursiers non seulement d’ArcelorMittal, mais aussi de toutes les sociétés sidérurgiques, alors que, directement, au mois d’août, il n’y a pas eu plus ou moins de commandes. C’est simplement une anticipation, car le marché pense qu’il va y avoir des effets réels.
Ces effets réels, on les verra au niveau de la consommation sidérurgique, par une baisse de la confiance des consommateurs, par une baisse des biens d’investissement et par tous les programmes de réduction de l’endettement public auquels on va assister dans les pays européens.
La crise actuelle est-elle aussi grave que celle de 2008?
«Elle est différente. Ce qui est en train de se passer, c’est qu’il ne va plus y avoir de projets d’infrastructures. La Bourse n’a fait qu’anticiper le mouvement.
En 2008, les Etats ont immédiatement mis en place des programmes de stimulation de l’économie. Aujourd’hui, il est question de durcir l’austérité et de réduire les dépenses pour résorber le déficit public. C’est donc différent.
Par ailleurs, en 2008, nous avions une bulle au niveau des stocks, avec des prix de l’acier très élevés. La bulle s’est évaporée, entrainant une chute des matières premières et des produits sidérurgiques. Les sociétés ont enregistré une perte du fait de la réduction brusque de leur encours. Cela n’est pas le cas cette fois-ci, car les prix des produits sidérurgiques sont moins élevés ainsi que les résultats. Nous n’avons pas observé de chute des prix des matières premières. Le minerai reste cher, le charbon reste cher, la ferraille reste chère. La crise que nous avons est la crise du vieux monde et non pas une crise du monde entier, contrairement à 2008.»

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