samedi 23 juin 2012

L’enfouissement du CO 2 soulève la polémique

Au nom des mêmes intérêts écologiques, partisans et opposants du projet Ulcos se sont affrontés, hier, dans l’hémicycle régional, à Metz.

Les réserves de Jean-Louis Beffa sur Ulcos avaient quelque peu douché son auditoire, lors de son récent passage devant le Cesel (Conseil économique, social et environnemental de Lorraine). Le président d’honneur et administrateur de Saint- Gobain exprimait ses doutes sur la pertinence industrielle du projet d’enfouissement de CO 2, résultant de l’activité sidérurgique, dans le sous-sol meusien. Depuis, le débat s’est déplacé sur le terrain environnemental, apportant de l’eau au moulin des sceptiques. Dans une étude sur le sujet, des géophysiciens américains pointent « le risque élevé de séismes » que ferait courir l’injection massive de vastes volumes de CO 2 dans les roches fragiles. Vu ce risque, « cette stratégie de réduire de façon importante les émissions de gaz constitue, à leurs yeux, une stratégie risquée » (lire ci-contre).
L’examen, hier, à l’hôtel de Région, d’une motion réaffirmant Ulcos comme priorité lorraine a, certes, recueilli l’adhésion massive du Cesel : seules deux voix contre et cinq abstentions, lors du vote. Le texte présenté par Guy Berger (Air Lorraine/3 e collège) insiste sur l’aspect novateur de l’initiative qui n’attend plus que le financement de Bruxelles : « Il est porté par un consortium d’industriels dont ArcelorMittal est le coordinateur et il s’inscrit dans le cadre d’un programme de recherche suivi et soutenu par la Commission européenne ». Nul doute pour la seconde assemblée lorraine, « ce projet permettra à la région, au-delà de la pérennisation de la filière liquide, de devenir une vitrine mondiale de la sidérurgie du XXI e siècle, avec cette rupture technologique majeure dans le processus de production de l’acier ».

« Une escroquerie »

Une vision pourtant jugée un peu trop idyllique pour certains. Fustigeant cette présentation, Pascale Combette (Lorraine nature environnement/3 e collège) conteste le bien-fondé de Ulcos. L’écologiste évoque la dangerosité potentielle d’un stockage massif de CO 2 dans « des nappes salines ouvertes non confinées ». Elle considère notamment que le procédé n’offre aucune garantie de confinement et n’exclut pas une contamination des nappes susceptible d’entrainer une chaîne de pollution des eaux. Voire un dégazage massif provoqué par l’apparition de failles, à l’instar de la fuite survenue en avril 2008 à Sleipner, en Norvège.
Au diapason, Alain Salvi (Conservatoire d’espace naturel de Lorraine/3 e collège) ne voit dans Ulcos « qu’un miroir aux alouettes ». Et de s’indigner : « C’est une escroquerie qui va inciter à produire toujours davantage de CO 2. Les Meusiens auront une poubelle nucléaire au sud et une poubelle au CO 2 au nord. Belle image d’attractivité », s’emporte celui qui votera tout de même la motion… au nom de la préservation de l’emploi !
Face à ces réticences, Raymond Bayer (CGT/2 e collège) objecte : « Moi, j’ai envie de faire l’éloge de la poubelle… Traite-t-on de cette question nous-mêmes en nous en donnant les moyens et en faisant progresser l’intérêt général ou contentons-nous de la refiler à la Chine ? »
Autre partisan indéfectible de l’enfouissement du CO 2, Roger Cayzelle, président du Cesel, considère que la solution s’impose « pour enfermer ArcelorMittal dans une logique de pérennisation de ses installations et de son activité ». Lequel tempère ensuite : « Dans un premier temps, on sera dans une phase d’innovation et d’expérimentation ». Gilbert Krausener (CGT) acquiesce : « C’est tout l’objet des recherche du BRGM. Ulcos est une nécessité ». Laquelle faisant souvent, comme on le sait, force de loi.

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